Le nouvel article 6.I.8 de la LCEN appliqué au harcèlement sur Instagram (Ordonnance de référé, Tribunal judiciaire de Paris, 14 janvier 2022 – Facebook)
15 février 2022
Le 14 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Paris a ordonné à Facebook Ireland (l’entité européenne de Facebook) de communiquer les données d’identification du titulaire d’un compte Instagram anonyme au contenu malveillant.
Cette demande a été initiée dans le cadre d’une procédure accélérée au fond puisqu’en application du nouvel article 6.I.8 de la LCEN modifié par la loi du 24 août 2021, il n’est plus possible d’obtenir ces informations par simple ordonnance sur requête.
Le demandeur à l’action était un photographe victime de harcèlement sur Instagram. L’objet de son action était d’obtenir de Facebook l’identité de l’individu, agissant de façon anonyme, qui indiquait à ses contacts qu’il était un violeur et un agresseur, dans un langage ordurier. Préalable obligatoire pour pouvoir engager des poursuites à son encontre.
En l’état du droit, les personnes éditant à titre non professionnel un service de communication au public en ligne n’ont pas l’obligation de communiquer les informations permettant de les identifier.
De leur côté, les hébergeurs sont assujettis au secret professionnel dans les conditions prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal, pour tout ce qui concerne la divulgation de ces éléments d’identification personnelle ou de toute information permettant d’identifier la personne concernée.
Le seul moyen pour la victime de contenus illicites est de saisir la justice afin d’obtenir la communication des éléments d’identification de l’internaute à l’origine de son dommage par l’intermédiaire de l’hébergeur et sur réquisition judiciaire.
Cette dispense d’identification directe accordée aux éditeurs non professionnels bride grandement l’effort de responsabilisation des acteurs du web opéré par la loi.
Dans le cas présent, le juge des référés fait droit à la demande du photographe en jugeant que les circonstances rapportées caractérisent un motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile et que « la communication demandée est proportionnée aux intérêts antinomiques en présence, le droit de la preuve de M.X, pour entreprendre le procès qu’il envisage, devant prévaloir sur l’anonymat du compte litigieux ».
Une décision juste au regard de la gravité des informations malveillantes diffusées sous couvert d’anonymat et en ce qu’elle permet à la personne visée de pouvoir y répondre.
Céline Cuvelier